jeudi 26 janvier 2012

La morale, le journalisme et le sport professionnel

Il n'y a pas si longtemps, Sébastian Hell et moi avons eu une petite conversation virtuelle sur la façon dont les chroniqueurs, blogueurs et journalistes de Cyberpresse couvrent l'univers des Canadiens de Montréal. Je lui exprimais, entre autres choses, mon indignation face à une entrevue que Mathias Brunet a accordée dans une vidéo publiée sur le site Internet Cyberpresse.ca.

Le "reportage" s'attarde à un groupe de fans des Canadiens de Montréal qui ont décidé de s'amuser aux dépends de Scott Gomez, un des joueurs de centre de cette équipe. Scott Gomez, empoche le plus haut salaire de tous les joueurs du Canadien, mais, le 5 février prochain, cela fera un an qu'il n'aura pas compter un but. Par conséquent, certains amateurs de hockey ont décidé de se montrer sarcastiques envers l'athlète et planifient de célébrer son triste exploit en arborant certains objets soulignant l'événement le 5 février prochain.

Il semble donc que La Presse se devait de faire appel à un de ses "experts" en la matière (je ne sais si en matière de sport, sociologie ou psychologie car, on s'entend, il s'agit de stratégie d'amateurs de hockey et non de joueurs ou d'équipe) et elle s'est tournée vers Mathias Brunet qui nous a éclairé avec la réflexion suivante:

"C'est irrespectueux envers l'athlète et, si [ce sont] de vrais fans, ils n'aident pas leur équipe parce que, des initiatives comme ça, on va en parler à travers la ligue et les joueurs -déjà qu'il y en a beaucoup qui n'ont pas le goût de venir à Montréal- ils vont avoir de moins en moins le goût."

Tout d'abord, je tiens à dire que, en ce qui concerne l'anecdote en soi, mes connaissances limitées dans le domaine du hockey me font voir Scott Gomez comme un passeur et non un marqueur. Il y a donc peu de chances que vous me voyiez en train de me moquer de Gomez dans les gradins du Centre Bell le 5 février prochain. Bref, "dans mon livre à moi", reprocher à Gomez de ne pas compter de but, c'est un peu comme reprocher à Mathias Brunet de ne pas s'exprimer sur les grands enjeux moraux de notre société.

Toutefois, il y a du pain, il y a des jeux. Chacun se débrouille comme il peut avec le pain, mais pour ce qui est du jeu, je suis désolé, mais si le fan du Canadien doit désormais se préoccuper de ce que "la ligue" va penser de lui, ce jeu risque de se transformer en névrose.

C'est donc de cela que je parlais avec Sébastian et je lui disais que, honnêtement, les journalistes, blogueurs et chroniqueurs me font chier lorsqu'ils parlent "d'attitude". Vous savez? Cette espèce de psychologie infuse dont la grâce divine les auraient dotées.

En fait, je ne suis pas contre le fait que les journalistes s'aventurent hors de leurs champs de compétences. D'ailleurs, je serais enchanté si cela arrivait plus souvent. Je suis certain qu'on aurait droit à des textes beaucoup plus intéressants.

Cependant, en ce qui concerne La Presse, c'est systématique, la critique se situe toujours par rapport à comment un individu ou un groupe aurait dû agir: les fans du Canadiens ne devraient pas se moquer de Gomez, Cammalleri ne devrait pas dire que l'équipe se comporte en "looser", Subban devrait écouter ses entraîneurs, etc.

Sûrement par coincidence, le lendemain, Sébastian m'a envoyé un courriel intitulé "Au moins un qui défend P.K. Subban". Le contenu de l'envoie ne se limitait qu'à un hyperlien m'amenant à une entrée de blogue de Mathias Brunet dans laquelle il défendait P.K. Subban, l'étincelant défenseur du Canadien de Montréal.

Cela m'amène donc à clarifier ma position quant au travail des journalistes sportifs, des journalistes qui couvrent d'autres domaines et, surtout, des chroniqueurs de La Presse. Alors, je précise que je suis d'accord avec la position de Mathias Brunet en ce qui concerne la situation de P.K. Subban, même si cela n'a pas vraiment d'importance. Je trouve aussi que ce chroniqueur est compétent dans ce qu'il fait en général.

Par contre, ce qui me dérange, c'est le voir donner des leçons de morale comme le font presque tous les journalistes et chroniqueurs sportifs ou non. Il s'agit donc d'un problème relatif à ceux qui pratiquent ces métiers au sein des médias de masse.

Je ne comprends pas ce qui les amène à croire qu'ils peuvent être des spécialistes pour juger l'attitude des joueurs de hockey ou des acteurs sociaux et politiques. Cela me dérangerait moins s'ils essayaient de sortir des lieux communs pour le faire.

Toutefois, leurs commentaires ressemblent à ceux des élèves de primaires qui "stoolent" leurs camarades de classe. On dirait que l'attitude idéal du joueur de hockey ainsi que des acteurs sociaux et politique, selon eux, serait celle d'une espèce de chrétien laïque que l'on voit très bien reflétée dans le titre d'une chronique de François Gagnon sur P.K. Subban: "Plaide coupable et apprends!"

Qu'est-ce qu'ils ont fait pour être si supérieurs à nous tous moralement?