jeudi 6 août 2009

"My name is Exaybachay. He Who Talks Loud, Saying Nothing...I preferred to be called Nobody." -Dead Man

Le texte sur Dédé Fortin je l'aime ben gros, mais je ne sais pas pourquoi, j'aime pas les expressions comme celle-là: "les Richard Séguin, Richard Desjardins et autres Paul Piché". D'ailleurs Cassivi l'utilise souvent et ça m'énerve. Ça sonne hautain je trouve.

Mais à part ça, le texte est excellent. Je le trouve sincère, honnête et touchant. Je suis pas mal d'accord dans l'ensemble. Dans le sens que moi aussi j'ai trouvé tous leurs albums à part "Dehors novembre" complètement insignifiants.

Toutefois, dans mon cas, mon premier contact avec "Dehors novembre" a été pas mal different. C'était en 2001, dans la fourgonnette quand on était en externe à Saint-Tite. On était tous pas mal saoûls (sauf le conducteur qui devait vraiment nous trouver cons) et il y en a un qui a insisté pour mettre le disque pour me dire à quel point c'était génial pendant une demie heure avant qu'on s'arrête pour une dangereuse session de "go-kart".

Je trouvais la musique très bonne, mais "l'intro à la "The End" des Doors", contrairement à Cassivi qui l'a trouvé "hypnotique, déchirante, magnifique", moi je l'ai trouvé carrément plagiée.

La poésie n'était pas si pire, mais sans plus. C'etait pas pire pour du "Colocs" mettons. Mais j'étais dans une phase dans laquelle j'écoutais du Leo Ferré constamment ce qui me donnait un répertoire de poèmes suicidaires d'une richesse incroyable qui mélangeait l'amour, l'anarchie, la révolte, la révolution, l'histoire, le sexe, les tabous, la litteratures, la mort, etc, etc, etc. Juste après ma séparation d'avec tu-sais-qui, Ferré avait su comment aller me chercher. Dédé, à ce moment-là, faisait, quant à moi, une musique encore trop "CKOI".

C'est juste maintenant, après des années loin de chez moi et après en avoir enfin fini avec Ferré (quoique je pense recommencer bientôt), que j'apprécie sa musique et que j'ai vraiment le goût de l'entendre pour ce que ça évoque. Ma copine ne comprend pas les paroles de "Dehors novembre", mais elle aime s'imaginer des images sur cette musique avant de dormir. Elle dit que ce qu'elle imagine sur cette toune-là ressemble beaucoup au "far-west". La chanson du "Répondeur" la touche beaucoup, surtout parce que le chanteur la chante de façon vraiment triste.

Je lui ai traduit les paroles du "Répondeur" et elle était un peu déçue. Je me suis déçu un peu moi-même en les traduisant. Je suppose que ce qui était important c'était le "feeling" que Dédé avait en la chantant. Dans le fond, c'est ça qui fait que la chanson est spéciale avec tout ce qu'elle évoque sur la neige, la pluie et la tristesse du mois de novembre qui font qu'elle n'aurait pas pu être composée ailleurs, quoique Tom Waits, sur "Black Rider", chante une chanson qui s'appelle "November" et qui donne vraiment le goût de se suicider. Sauf que Dédé a le mérite de l'avoir chanter en français et, surtout, en joual.

Les francais ne parlent pas beaucoup de la neige dans leurs chansons et, quand ils en parlent, ça sonne faux pour nous. C'est comme si ici je me mettais à parler à un mexicain de la pauvreté ou de la brutalité policière à Montréal.

Mais Dédé n'était pas une légende, pas plus que Léo Ferré, Tom Waits ou Elvis Presley. Tout comme eux, c'était le produit d'une industrie. L'industrie culturelle, celle-qui fait vivre les chroniqueurs de La Presse et Dédé Fortin (et qui l'a tué aussi) mais qui refuse de nous faire vivre.

Ça, ça fait de nous des gens beaucoup plus libres que tout le monde de Céline Dion à Slaves on Dope, et tous ceux que tu as nommés: Jean Leloup, Jimmy Bourgoing, Les Colocs, Pas Chic Chic, Panopticon Eyelids et Shalabi Effect.

Quant à moi, ce que tu arrives à faire avec ton festival qui te coûte les yeux de la tête ça vaut mille fois plus que ce que tu as pu faire avec tous ceux que je viens de nommer. Sans t'en rendre compte, tu mets des bâtons dans les roues d'une industrie qui prétend s'enrichir en mettant des idées sur le marché.

Toutefois, si ce que tu désires vraiment c'est de percer dans cette industrie-là, j'ai vraiment l'impression qu'il va falloir que tu le fasses en francais, pas par souci de préservation de la langue, mais parce que c'est sur le marché francophone que tu vas vraiment rencontrer le public qui va te trouver original. En anglais tout a été fait et tout se fait tout le temps. En francais, et surtout en québécois, on nous impose le même type de produit culturel depuis la fin des années soixante-dix. S'il y a une culture à laquelle tu peux apporter quelque chose, c'est celle-là. En ce sens-là, je t'encourage fortement à ce que ton prochain spectacle soit celui que tu voulais faire complètement en francais, même si ça implique de brailler en chantant "Le Répondeur".

Sauf que, encore-là, on parle d'entrer dans l'industrie. Une industrie qui construit des légendes, des mythes, qui servent littéralement à aliéner le public et à le rendre passif, à le controler par une habile stratégie de pain et de cirque. Quand cette industrie-là met sur le marché des gens qui la critiquent, c'est seulement dans le but de se légitimer à elle-même, pour pouvoir dire que tout le monde y trouve sa place et que c'est la meilleure facon de fonctionner que l'on puisse se permettre d'imaginer. Et oui... ils contrôlent même notre imagination les bâtards. L'industrie culturelle c'est à ça que ça sert et à rien d'autre.

Donc, comme je le disais plus haut, le festival que tu organises fait de toi quelqu'un de pas mal plus libre et donc plus grand que la liste de personnes que tu as nommé à ta correspondante. À partir de maintenant, selon moi, ta vrai vie d'artiste, ta vraie vie publique commence et tu n'as plus à t'affirmer en ressassant un passé glorieux.

Ton présent suffit amplement parce que tu as travaillé d'arrache-pied pour réussir à mettre en place un festival qui donne la chance à ceux qui aiment tripper en faisant de la musique de partager leur passion avec un public qui aime écouter autres choses que ce que l'industrie a à leur offrir.

D'ailleurs, (ton ex-groupe que je te ferai la faveur de ne pas nommer), je ne les ai jamais entendu, mais, selon moi, ils ont vendu leur âme au diable et ils sont désormais condamnés à demeurer dans l'ombre d'Ozzy. À mon avis, c'est un groupe dépourvu d'intérêt.

Mobile c'est encore pire parce que je ne les connait même pas, mais je ne fais pas confiance à des groupes qui gagnent des concours. Les concours pour moi sont un raccourci qui sert de prétexte pour faire de l'argent sans travailler. Leur gloire c'est plus de la chance que du travail ou du talent. Ça ne vaut pas grand chose tant qu'à moi.

Quant aux Colocs, je trouve ça pas mal pathétique qu'un collectif de gens qui font de la musique qui s'auto-proclame "groupe" meurt avec son chanteur. Finalement, c'était pas si un "groupe" que ça, ils auraient dû s'appeler Dédé Fortin, ça aurait fait pareil.

Quant à la mort de Dédé Fortin, ca fait peut-être cliché de dire que c'est l'industrie qui l'a tué, mais moi j'ai l'impression que si le gars n'avait pas été aussi exposé, il ne serait peut-être pas mort à l'heure qu'il est. Le pire hommage qu'on puisse lui rendre maintenant c'est d'en faire un mythe. Parce qu'un mythe c'est de la fiction et je pense que, au moins un mérite de ce chanteur-là, c'est d'avoir eu pour souci d'être vrai et authentique. Malheureusement, je pense que c'est inévitable d'en faire une légende parce qu'on aime vraiment se faire raconter des histoires.

Sur ce, je reviens à toi, je trouve que le principal mérite de ton festival et des concerts que tu donnes en général, c'est d'avoir surgi de ta propre initiative dans des conditions qui rendaient ta tâche presque impossible parce que l'industrie ne permet pas aux "outsiders" de lui faire des surprises.

Maintenant, grâce a toi, il y a une poignée de musiciens qui peuvent goûter à des applaudissements au moins une fois par année. Quand bien même que cette poignée se résumerait juste à toi et aux groupes dont tu fais la première partie ou qui font ta première partie, tu pourras toujours te définir comme un accident dans l'histoire, un imprévu et ça... c'est grandiose.

Ton ami qui a bien hâte de recommencer à jammer avec toi,

Mala Estrella

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