samedi 15 août 2009

Notre-Dame-Dans-La-Marde

Le Collège Notre-Dame
Où se transmet l'Éducation
Dans l'amour de la tradition
(Aux filles aux chastes intentions)
- Mononc' Serge

Ainsi donc, Hydro-Québec, après avoir augmenté ses tarifs et fait chier l'ensemble de la population, a décidé de faire un don au réputé et réputable Collège Notre-Dame, qui, semble-t-il, a besoin de fonds pour rénover ses infrastructures sportives.

Cyberpresse presse le public d'émettre son opinion sur le sujet en prenant soin de mener le sujet vers le 'contre' en mentionnant que le PDG d'Hydro ''donne aux riches''...

À l'Assemblée Nationale, l'Opposition est contre et réclame la tête de Thierry Vandal, le PDG en question; le PQ semble l'être encore plus puisqu'il a droit à son propre article. Un dénommé Sylvain Gaudrault, aussi, est contre, outré, même, selon Le Quotidien, mais le journal ne mentionne pas pourquoi son opinion vaut quoi que ce soit...

Bon, c'est sûr que c'est d'un goût, disons, douteux, qu'on prenne l'argent que tous les Québécois ont payé en hydroélectricité et qu'on en remette une partie à une école qui coûte quelques milliers de dollars par année à chaque élève - surtout que ladite école s'adonne à être celle où Vandal a étudié et où, en plus, il siège au conseil d'administration.

Peut-être suis-je biaisé parce que moi aussi, j'y suis allé à Notre-Dame, et qu'ils m'y ont lavé le cerveau, mais, en soi, je vois beaucoup plus de points ''pour'' que de points ''contre'' cette histoire.

Bon, on veut amener le débat vers un angle ''on privilégie les riches avec l'argent des pauvres'', et c'est en quelque sorte vrai, mais il y a probablement quand même autant (sinon plus) de gens moins aisés qui envoient leur enfant à Notre-Dame que de riches dans les écoles publiques - pour la simple et bonne raison que Notre-Dame demeure une des meilleures institutions d'éducation au pays depuis 140 ans; en effet quand L'Actualité ne le place pas dans le Top 5 de ses écoles dans son palmarès annuel, elle le place ex-aequo deuxième-qui-devient-neuvième parce que trop d'écoles semblent se valoir en même temps, comme elle l'a fait en 2004.

On parle ici d'une école secondaire où 94% des élèves finissent par obtenir au diplôme de Cégep, ce n'est pas rien quand on considère que plus de la moitié de la population de notre Belle Province ne se rend pas là - public ou privé. Ne faudrait-il pas encourager les institutions qui forment bien ses jeunes sous le seul prétexte percevoient des frais d'admission? Ce serait un nivellement par le bas injuste et indéfendable!

Bon, va pour la qualité de l'école.

On semble aussi oublier qu'Hydro-Québec n'est qu'à moitié une société publique; elle a aussi des actionnaires, et des comptes à rendre. Et des impôts à tenter de ne pas payer. Pour ce faire, elle utilise des abris fiscaux. Elle subventionne l'art, certains festivals, certaines courses automobiles. Cette fois-ci, elle a décidé de donner à une école secondaire.

Une école secondaire - pas une prison, pas une clinique de méthadone, pas un centre d'euthanasie, pas une église, pas un congrès raciste, pas à la caisse du gouvernement Harper, pas à des millionnaires sportifs, pas des compagnies pharmaceutiques, pas des pollueurs.

Et pas non plus aux ''riches'' qui y envoient leurs kids. À l'établissement, qui ne peut augmenter ses frais d'admission que d'un certain pourcentage chaque année et dont les dépenses, comme les autres écoles il est vrai, ne font qu'aller en augmentant.

En plus, Vandal s'est abstenu de participer aux réunions d'Hydro et du Collège pendant qu'on pesait cette option. Comme les Molson l'ont fait quand ils ont acheté le Canadien il y a 3 mois malgré qu'ils étaient et sur le conseil d'aministration du Canadien et celui de Coors...

Encore une fois: c'est correct pour une compagnie privée (deux en fait) qui ne dévoilent jamais leurs 'chiffres' malgré qu'ils nous vendent leurs billets de spectacles 300$ (U2, Centre Bell) et leurs billets de hockey 175$ (Canadien, Centre Bell, match hors-concours!) - mais une école secondaire?

Le problème d'éthique en est un de société: une seule et même personne ne devrait pas pouvoir siéger sur plus d'un conseil d'administration. Ça crée une homogénéité dangereuse et tendancieuse qui oriente la société au complet dans une direction que de moins en moins de gens ont le pouvoir de décider de suivre. C'est vrai - et c'est mauvais. Mais tant qu'il n'y aura pas une loi contre, il faudra vivre avec.

Un des pires cas de ce type de conflit d'intérêts demeure Jacques Ménard, actuel chef de BMO qui a, justement, procédé à la vente du Canadien. Quand les Expos ont été vendus en 1991, vu ses contacts avec BMO Nesbitt Burns qui en devenaient actionnaires minoritaires, il a été nommé au conseil d'administration des Expos, ce qui l'a conduit à plusieurs postes simultanés, que je cite du site web de BMO:

L. Jacques Ménard est président du conseil d’administration de BMO Nesbitt Burns, l’une des plus importantes sociétés de valeurs mobilières au Canada. Il est également président de BMO Groupe financier, Québec. À ce titre, il chapeaute les activités de BMO Banque de Montréal et de ses filiales qui comptent quelque 170 succursales et 5 000 employés.

M. Ménard est présentement administrateur de Claridge Inc., de l’Institut de cardiologie de Montréal, de l’Orchestre Symphonique de Montréal et des Alouettes de Montréal. Il est également membre du comité consultatif de l’Institut des administrateurs de sociétés (Section du Québec) et membre associé du conseil d’administration des Réseaux canadiens de recherches en politiques publiques inc., en plus de siéger au Conseil consultatif international de l’École des HEC, au Conseil consultatif de l’École des affaires publiques Glendon de l’Université York et au conseil d’administration de la Fondation Macdonald Stewart.

M. Ménard a par ailleurs présidé le Comité de travail sur le financement et la pérennité du système de santé et de services sociaux du Québec, mis sur pied par le Gouvernement du Québec en décembre 2004. Il a publié en 2008 un premier livre intitulé Si on s’y mettait… , dans lequel il propose dix grands chantiers assortis de propositions d’actions concrètes pour relancer le Québec. Dans la foulée de ce livre, il a créé le Groupe d’action sur la persévérance et la réussite scolaires, composé de 28 membres en provenance de ministères du gouvernement du Québec, du milieu des affaires et d’organismes oeuvrant dans des domaines reliés à la persévérance scolaire. Le Groupe a dévoilé son plan d’action en mars 2009.

Hey, ça en fait des affaires! Parlez-moi de ça, un gars qui en connaît autant en finances qu'en musique classique, en sports, en santé, en politique et en éducation! Crissez-le premier ministre, quelqu'un!

À côté de lui, Thierry Vandal, c'est rien. Et pourtant, c'est Vandal qu'on accuse de corruption et de conflits d'intérêts. Vous y comprenez quelque chose, vous?

De toutes façons, peu importe de quel côté du débat vous vous placez, demandez-vous: est-ce la première fois que l'élite redonne à l'élite? Surtout une élite qu'elle connaît? Dites-vous qu'on est ici dans un cas bien moins pire que celui de Dick Cheney et les contrats attribués à Halliburton en Iraq et en Afghanistan, ou des lois changées par George W. Bush pour accomoder ses amis de l'industrie pétrolière...

Encore une fois: Hydro-Québec a donné de l'argent...
à une école secondaire...
francophone...
originellement catholique...

Sacrament!

ajout: dans la foulée de la controverse, Notre-Dame a refusé le cash...

dimanche 9 août 2009

Hostie De Monde, Pareil

Maudite planète mal faite.

Nous, humains, sommes l'espèce qui semble y régner, donc nous assumons y être l'espèce la plus intelligente, malgré certaines de nos actions, qui, historiquements, voudraient faire croire que nous en sommes la plus conne.

Un autre trait qui fait de nous ''nous'', c'est cette capacité, en face à face, un à un, de pouvoir se parler et se comprendre, ou au moins dialoguer. Sans faire le grand détour qu'il faudrait probablement faire pour l'expliquer - et je ne le ferai pas pour la simple et bonne raison que c'est quelque chose que même moi je sais depuis ma tendre enfacne, donc probablement que TOUS les humains sont passés par là - mais, crisse, tout le monde est parlable. Tout le monde, one-on-one, on est cools.

Même quand on haït la face de quelqu'un, souvent, après avoir été obligé de lui parler, on peut même finir par l'aimer. Je ne sais pas si c'est du conditionnement, parce que, constamment on peut le voir au cinéma, dans des buddy movies, par exemple, et les vieux clichés du 16 siècle comme ''le sentiment le plus proche de la haine, c'est l'amour''... bref, comme l'oeuf et la poule, il est difficile de savoir lequel est venu en premier (en passant, c'est l'oeuf, parce que les lézards aussi se pondent, et cela, depuis des millénaires, alors que les poules n'ont que quelques centaines d'années, peu importe ce qu'en disent les Texans).

Tout ça pour dire que le gars de Mobile, tabarnak, c'est un crisse de bon gars, un bon équilibre entre gars de party et homme de famille responsable, avec un humour proche du mien parfois avec ses pointes sarcastiques (mais en moins méchant, évidemment).

Hostie de monde, pareil.

jeudi 6 août 2009

"My name is Exaybachay. He Who Talks Loud, Saying Nothing...I preferred to be called Nobody." -Dead Man

Le texte sur Dédé Fortin je l'aime ben gros, mais je ne sais pas pourquoi, j'aime pas les expressions comme celle-là: "les Richard Séguin, Richard Desjardins et autres Paul Piché". D'ailleurs Cassivi l'utilise souvent et ça m'énerve. Ça sonne hautain je trouve.

Mais à part ça, le texte est excellent. Je le trouve sincère, honnête et touchant. Je suis pas mal d'accord dans l'ensemble. Dans le sens que moi aussi j'ai trouvé tous leurs albums à part "Dehors novembre" complètement insignifiants.

Toutefois, dans mon cas, mon premier contact avec "Dehors novembre" a été pas mal different. C'était en 2001, dans la fourgonnette quand on était en externe à Saint-Tite. On était tous pas mal saoûls (sauf le conducteur qui devait vraiment nous trouver cons) et il y en a un qui a insisté pour mettre le disque pour me dire à quel point c'était génial pendant une demie heure avant qu'on s'arrête pour une dangereuse session de "go-kart".

Je trouvais la musique très bonne, mais "l'intro à la "The End" des Doors", contrairement à Cassivi qui l'a trouvé "hypnotique, déchirante, magnifique", moi je l'ai trouvé carrément plagiée.

La poésie n'était pas si pire, mais sans plus. C'etait pas pire pour du "Colocs" mettons. Mais j'étais dans une phase dans laquelle j'écoutais du Leo Ferré constamment ce qui me donnait un répertoire de poèmes suicidaires d'une richesse incroyable qui mélangeait l'amour, l'anarchie, la révolte, la révolution, l'histoire, le sexe, les tabous, la litteratures, la mort, etc, etc, etc. Juste après ma séparation d'avec tu-sais-qui, Ferré avait su comment aller me chercher. Dédé, à ce moment-là, faisait, quant à moi, une musique encore trop "CKOI".

C'est juste maintenant, après des années loin de chez moi et après en avoir enfin fini avec Ferré (quoique je pense recommencer bientôt), que j'apprécie sa musique et que j'ai vraiment le goût de l'entendre pour ce que ça évoque. Ma copine ne comprend pas les paroles de "Dehors novembre", mais elle aime s'imaginer des images sur cette musique avant de dormir. Elle dit que ce qu'elle imagine sur cette toune-là ressemble beaucoup au "far-west". La chanson du "Répondeur" la touche beaucoup, surtout parce que le chanteur la chante de façon vraiment triste.

Je lui ai traduit les paroles du "Répondeur" et elle était un peu déçue. Je me suis déçu un peu moi-même en les traduisant. Je suppose que ce qui était important c'était le "feeling" que Dédé avait en la chantant. Dans le fond, c'est ça qui fait que la chanson est spéciale avec tout ce qu'elle évoque sur la neige, la pluie et la tristesse du mois de novembre qui font qu'elle n'aurait pas pu être composée ailleurs, quoique Tom Waits, sur "Black Rider", chante une chanson qui s'appelle "November" et qui donne vraiment le goût de se suicider. Sauf que Dédé a le mérite de l'avoir chanter en français et, surtout, en joual.

Les francais ne parlent pas beaucoup de la neige dans leurs chansons et, quand ils en parlent, ça sonne faux pour nous. C'est comme si ici je me mettais à parler à un mexicain de la pauvreté ou de la brutalité policière à Montréal.

Mais Dédé n'était pas une légende, pas plus que Léo Ferré, Tom Waits ou Elvis Presley. Tout comme eux, c'était le produit d'une industrie. L'industrie culturelle, celle-qui fait vivre les chroniqueurs de La Presse et Dédé Fortin (et qui l'a tué aussi) mais qui refuse de nous faire vivre.

Ça, ça fait de nous des gens beaucoup plus libres que tout le monde de Céline Dion à Slaves on Dope, et tous ceux que tu as nommés: Jean Leloup, Jimmy Bourgoing, Les Colocs, Pas Chic Chic, Panopticon Eyelids et Shalabi Effect.

Quant à moi, ce que tu arrives à faire avec ton festival qui te coûte les yeux de la tête ça vaut mille fois plus que ce que tu as pu faire avec tous ceux que je viens de nommer. Sans t'en rendre compte, tu mets des bâtons dans les roues d'une industrie qui prétend s'enrichir en mettant des idées sur le marché.

Toutefois, si ce que tu désires vraiment c'est de percer dans cette industrie-là, j'ai vraiment l'impression qu'il va falloir que tu le fasses en francais, pas par souci de préservation de la langue, mais parce que c'est sur le marché francophone que tu vas vraiment rencontrer le public qui va te trouver original. En anglais tout a été fait et tout se fait tout le temps. En francais, et surtout en québécois, on nous impose le même type de produit culturel depuis la fin des années soixante-dix. S'il y a une culture à laquelle tu peux apporter quelque chose, c'est celle-là. En ce sens-là, je t'encourage fortement à ce que ton prochain spectacle soit celui que tu voulais faire complètement en francais, même si ça implique de brailler en chantant "Le Répondeur".

Sauf que, encore-là, on parle d'entrer dans l'industrie. Une industrie qui construit des légendes, des mythes, qui servent littéralement à aliéner le public et à le rendre passif, à le controler par une habile stratégie de pain et de cirque. Quand cette industrie-là met sur le marché des gens qui la critiquent, c'est seulement dans le but de se légitimer à elle-même, pour pouvoir dire que tout le monde y trouve sa place et que c'est la meilleure facon de fonctionner que l'on puisse se permettre d'imaginer. Et oui... ils contrôlent même notre imagination les bâtards. L'industrie culturelle c'est à ça que ça sert et à rien d'autre.

Donc, comme je le disais plus haut, le festival que tu organises fait de toi quelqu'un de pas mal plus libre et donc plus grand que la liste de personnes que tu as nommé à ta correspondante. À partir de maintenant, selon moi, ta vrai vie d'artiste, ta vraie vie publique commence et tu n'as plus à t'affirmer en ressassant un passé glorieux.

Ton présent suffit amplement parce que tu as travaillé d'arrache-pied pour réussir à mettre en place un festival qui donne la chance à ceux qui aiment tripper en faisant de la musique de partager leur passion avec un public qui aime écouter autres choses que ce que l'industrie a à leur offrir.

D'ailleurs, (ton ex-groupe que je te ferai la faveur de ne pas nommer), je ne les ai jamais entendu, mais, selon moi, ils ont vendu leur âme au diable et ils sont désormais condamnés à demeurer dans l'ombre d'Ozzy. À mon avis, c'est un groupe dépourvu d'intérêt.

Mobile c'est encore pire parce que je ne les connait même pas, mais je ne fais pas confiance à des groupes qui gagnent des concours. Les concours pour moi sont un raccourci qui sert de prétexte pour faire de l'argent sans travailler. Leur gloire c'est plus de la chance que du travail ou du talent. Ça ne vaut pas grand chose tant qu'à moi.

Quant aux Colocs, je trouve ça pas mal pathétique qu'un collectif de gens qui font de la musique qui s'auto-proclame "groupe" meurt avec son chanteur. Finalement, c'était pas si un "groupe" que ça, ils auraient dû s'appeler Dédé Fortin, ça aurait fait pareil.

Quant à la mort de Dédé Fortin, ca fait peut-être cliché de dire que c'est l'industrie qui l'a tué, mais moi j'ai l'impression que si le gars n'avait pas été aussi exposé, il ne serait peut-être pas mort à l'heure qu'il est. Le pire hommage qu'on puisse lui rendre maintenant c'est d'en faire un mythe. Parce qu'un mythe c'est de la fiction et je pense que, au moins un mérite de ce chanteur-là, c'est d'avoir eu pour souci d'être vrai et authentique. Malheureusement, je pense que c'est inévitable d'en faire une légende parce qu'on aime vraiment se faire raconter des histoires.

Sur ce, je reviens à toi, je trouve que le principal mérite de ton festival et des concerts que tu donnes en général, c'est d'avoir surgi de ta propre initiative dans des conditions qui rendaient ta tâche presque impossible parce que l'industrie ne permet pas aux "outsiders" de lui faire des surprises.

Maintenant, grâce a toi, il y a une poignée de musiciens qui peuvent goûter à des applaudissements au moins une fois par année. Quand bien même que cette poignée se résumerait juste à toi et aux groupes dont tu fais la première partie ou qui font ta première partie, tu pourras toujours te définir comme un accident dans l'histoire, un imprévu et ça... c'est grandiose.

Ton ami qui a bien hâte de recommencer à jammer avec toi,

Mala Estrella

Merde, Mobile, Amis Et Inutilités

Hey Alex,

Comme tu le sais si bien, j'ai l'habitude de me mettre dans la marde.

Je parlais avec une amie dans un bar plus tôt en soirée, et on en est venus sur le sujet de moi. Ou d'un de ses amis. De carrières en musique, en fait. Comment lui, avec son groupe Mobile, a réussi dans la vie pendant que mes projets semblent stagner.

On parle ici d'une prof de danse professionelle, une fille qui me comprend la plupart du temps...

Donc elle et son chum Éric partent vers minuit, moi je reste jusqu'à 4 heures, j'aide à fermer la place et tout. Pis en arrivant chez moi, j'y repense un peu, pis je lui envoie un email. Le voici retranscrit:

''Je sais c'est con''...


... mais j'ai eu un flash poche d'une phrase quand on était au Fullum.

(pour vrai, ça me tentait pas de t'écrire tout ça, mais on m'a dit que c'était pour le mieux, pour pas paraître comme si les shows que tu as vus, avec aucune foule présente, était chose habituelle...)

Tu disais que ton ami, qui est/était dans Mobile, le groupe pour lequel Pierre-Marc Hamelin joue la batterie, officiellement...

Je sais que pour toi je suis ''juste Seb'', mais j'aimerais clarifier:

1. le concours que Mobile a gagné en 2001, CHOM L'Esprit... je l'ai gagné en 1994, un an après Les Respectables, avec un groupe qui s'appelle (nom censuré, je n'ai pas le droit de le nommer publiquement, sous peine de poursuites). À cause de moi (de mon ''moins de 18 ans'' en fait), ils ont dû changer les règles du jeu...

2. tous les membres officiels de (ce groupe que je ne peux pas nommer) sont, en ce moment, millionnaires, ayant été signés par nul autre qu'Ozzy Osbourne à un contrat de disques et de tournée... ils se retrouvent aussi sur des compils ''Ozzfest'', des succès internationaux...

3. j'ai quand même écrit 3 tounes pour Jean Leloup, un chanteur relativement connu, dont une qui se retrouve sur un de ses albums...

4. mon ancien drummeur, avec lequel j'ai déménagé à Nouïorque, Jimmy Bourgoing, a été le batteur d'un petit groupe appellé Les Colocs, de 1990 à 1998

5. mon ancien bassiste, des années nouïorquaises, Éric Gingras, a vendu plus de 75,000 CDs avec ses groupes Pas Chic Chic, Panopticon Eyelids et Shalabi Effect depuis 2000...

6. (le groupe in-nommable), quand j'ai été avec eux, soit de 1994 à 1996, ont vendus plus de disques que Paul Piché et Jim Corcoran réunis, selon HMV Canada, en plus des disques ''illégals'' aux shows et dans la rue qu'on vendait...

C'est con, mais je suis quand même plus que le petit nobody que tu connais. J'ai un festival annuel (dans sa 5e année) qui a fait la première page de 3 journaux différents et j'ai un nom auxquels veulent s'associer, chaque année, 45 à 75 groupes locaux.

J'ai beau être moins connu et moins riche que d'autres intervenants de la scène locale, je ne me sens aucunement inférieur à eux.

Sans rancune, je te le jure,


Seb!
xxx
Je n'avais aucune raison d'en reparler, j'aurais pus juste me la fermer et oublier. Je ne veux pas embarquer dans un débat avec elle...

Sacrament que j'suis con!

Dehors, Novembre: Dédé Fortin, Rêveur Éveillé

Faut croire qu'il est temps de se remémorer. Cet hiver, il y a eu le film, Dédé À Travers Les Brumes, qui a amené sa vague de souvenirs, puis cette semaine, il y eut pas moins de trois spectacles-hommages à Dédé Fortin, dont un avec quelques-uns de ses anciens comparses des Colocs.

Puis une autre pluie de textes sur André ''Dédé'' Fortin, dont trois sur Cyberpresse: Marc Cassivi qui me vole mon opinion, Alexandre Vigneault aussi, et Marie-Christine Blais en fan toujours aussi finie qui parle de son enterrement.

Bon, je dis ''vole mon opinion'', mais ce n'est que parce qu'eux aussi n'ont pas trippé sur le premier disque des Colocs, celui des méga-succès Julie, Passe-Moé La Puck et La Rue Principale (bien que j'avais trouvé les clips pas mals). C'était, pour moi, ni plus ni moins que de la musique de party (trop?) typiquement provinciale avec des textes vaguement sociaux mais assez communs, trop évidents - comme une publicité où l'on voit des enfants africains mourrir de faim. Bien sûr que ça nous touche, mais: 1. vous y êtes déjà à les filmer, aidez-les vous-mêmes, et 2. c'est trop évident qu'on joue avec nos instincts primaires, c'est devenu plus qu'on sait qu'on se sentirait mal d'être indifférents alors on s'efforce de ne pas l'être.

Déjà, en 1995, avec Bon Yeu, sur Atrocetomique, bien que la langue y était plus crue, le message passait mieux. Le problème de la rareté de l'emploi, de la pauvreté y était quand même traité plus subtilement et moins directement que dans Passe-Moé La Puck, qui traitait d'itinérance et de l'hypocrisie de l'attention qu'on y consacre au temps des fêtes. Le clip de Bon Yeu, en plus, sa simplicité, en fait, ne faisait qu'ajouter au message: loin du stop-motion des trois premiers hits, on reprenait les cartons blancs avec messages en noir de Subterranean Homesick Blues de Bob Dylan, le premier clip à utiliser ce procédé, mais, par surcroît, de filmer le tout dans la cour d'une église abandonnée - située à côté du 2116 St-laurent où le groupe a été formé - vouée à la démolition malgré son statut de monument national, on ajoutait un second degré à l'idée.

Ah, les idées. Fortin en débordait. Celle de lancer son deuxième album au Spectrum, au party référendaire du camp du Oui le soir du référendum sur la souveraineté de 1995, alors que Mike Sawatzky, guitariste du groupe, un Cri anglophone de l'Ouest Canadien de naissance, est partisan du Non, en était une qu'il aurait pu abandonner. Un peu parce que c'était un pari risqué de devoir chanter ses chansons de party dans une ambiance de défaite si défaite il devait y avoir, mais aussi parce qu'il est prétentieux, après seulement un album, de se faire la tête d'affiche d'une cause défendue depuis des décennies par les Richard Séguin, Richard Desjardins et autres Paul Piché.

Et non seulement il y a eu défaite, mais le discours que prononça Jacques Parizeau, blâmant légendairement ''l'argent et le vote ethnique'' allait totalement à l'encontre des valeurs de Dédé, qui voulait, oui, un Québec souverain et indépendant, mais le voulait inclusif, pour tous ceux qui voulaient être Québécois, peu importe la langue d'origine, la couleur de peau, la religion, l'orientation sexuelle...

Le Québec de Dédé Fortin non seulement acceptait un Mike Sawatzky mais tenait à son épanouissement. Celui de Parizeau lui a confirmé ce que Sawatzky avait entendu toute sa vie: speak white, hostie. M'enfin...

Je ne sais pas si je suis anormal ou vicieux, mais je semble préférer l'art qui naît dans la tristesse. Avec la mort de son comparse et Coloc d'origine Patrick Di Napoli (VIH, 1994) , la défaite référendaire et la crise du verglas déprimante à souhait début 1998, Fortin en a broyé du noir.

Et il nous a pondu Dehors Novembre, le deuxième meilleur disque de l'histoire du Québec. Je vous épargnerai pour l'instant (et garderai pour un texte prochain) les raisons qui me poussent à l'en classer ainsi (et l'identité des autres qui l'entourent), mais il s'agît d'un album parfait: sombre, texturé, textes recherchés et poignants, ouverture sur le monde, phrases en Wolof, band aggrandi, quelques tounes plus beatées (dont une entièrement reggae) pour plaire aux radios, la meilleure chanson une ballade morbide - Le Répondeur - que le groupe refuse de sortir en single (un peu comme Black, de Pearl Jam, en 91-92), un vrai trip artistique réussi du début à la fin.

Je l'ai acheté parce qu'il était en spécial au Future Shop à 9.99$ (comme la plupart des nouveautés de la semaine à l'époque) et je savais que je pouvais le revendre pour 6 ou 7 dollars à un magasin de disques usagés si je ne l'aimais pas, une moindre perte; j'avais l'habitude d'acheter entre 5 et 10 disques par semaine à l'époque, juste pour voir (et surtout entendre!) ce qui se faisait, partout, en musique.

C'était en mai 1998, premiers balbutiements de ma relation avec une fille qui s'appelait Myriam. En arrivant chez ma copine, qui travaillait, je me suis assis sur le divan et j'ai mis le disque, m'attendant à endurer un calvaire d'environ une heure avant de passer à autre chose. Mais voilà, je n'ai pas bougé d'un poil pendant toute l'écoute, même qu'une fois le disque terminé, je suis resté sur place, ébahi, mortifié, atteint, dévasté.

Chaque mot un pincement au coeur, chaque phrase qui se termine un tour de fer dans la plaie. Je l'ai ré-écouté 6 autres fois avant que Myriam ne revienne de travailler.

- Qu'est-ce que tu fais là?
- Je viens de finir d'écouter le nouveau disque des Colocs. Sept fois...
- Sept fois? Mais tu ne les aime même pas!
- C'est ma-la-de. C'est tellement bon, tellement touchant, tellement marquant. Tu te souviens il y a deux ans, l'effet qu'a eu Le Dôme de Jean Leloup? Bien que tout le monde l'aimait, ce fut la surprise quand même quand le chef d'oeuvre est sorti?
- Ouais...
- Pareil. Mais en triste au lieu d'en fucké. Au lieu de te confondre dans un Manoir À L'Envers - quand tu ne sais pas qui est M.C. Escher, bien entendu - ou de te parler d'Edgar Poe saoûl sur le bord de la route, ben il te parle de mort, de dépression hivernale, de solitude. Et pis ça frappe dans le mille.

Contrairement à ce que l'on peut penser, puisque je suis un musicien avec une formation en cinéma, rarement je n'associe une chanson avec un événement, sauf, bien entendu, dans un concert. Je le précise parce qu'à l'été 1998, ma relation avec la fille citée plus haut a pris fin. Il appert aussi que j'ai passé une bonne partie de l'été à écouter l'album des Colocs. Certains font le lien: il était déprimé, il a écouté de la musique déprimante, c'est pour cela qu'il aime l'album. Mais non. Non seulement il n'y avait aucune chanson sur repeat chez moi, mais même à ce jour, je n'associe aucune chanson (d'aucun artiste) ni aux meilleurs ni aux pires moments de ma relation avec elle, ni à ma façon de passer au travers la rupture (qui fut, en fait, d'obtenir le premier ''emploi de rêve qui allait me décevoir'', soit de travailler au magasin de livres et de disques usagés L'Échange).

Certaines chansons ont beaucoup tourné à la radio et à MusiquePlus, je pense ici évidemment à Tassez-Vous De D'Là et Pis Si Ô Moins, une rotation excessive qui aurait pu tuer le goût d'entendre ces chansons-là, mais il n'en fut rien. Et c'est tant mieux.

Avec le temps, j'ai pu apprivoiser certaines des pièces des albums précédents de façon à ne pas chercher les toilettes à tout prix quand je les entends dans un bar ou chez quelqu'un, mais elles demeurent moins bonnes et moins marquantes, moins poignantes que celles de Dehors Novembre. Comme si elles étaient incomplètes.

J'en discutais avec Jimmy Bourgoing, leur batteur originel, qui quittait le navire en 1998. Même lui ne peut écouter certaines pièces, dont la chanson-titre dont il a co-signé la musique, de l'album, parce qu'elles sont trop touchantes.

Il est difficile d'élever au rang de légende un artiste qui a pondu un chef d'oeuvre et deux albums potables, mais on l'a fait pour Kurt Cobain en 1994, même que pour lui, de façon posthume, on a révisé tous les palmarès du temps qu'il était en vie pour le faire passer de la deuxième, troisième, cinquième, dixième place à la première, révisionnisme assez bâtard. Et je pleure chaque fois que Dédé Fortin est comparé à Cobain, parce que c'est le rabaisser énormément que de le catégoriser ainsi.

Avec Leloup, Fortin aura été le porte-étendard d'une culture québécoise populaire et intelligente des années 90, qu'ils ont dû porter bien haut et bien seuls, malheureusement, trop peu souvent suivis par des Daniel Bélanger et Kevin Parent pas toujours à la hauteur - et dépassés en termes de ventes par des Éric Lapointe cheaps et des centaines de clones de Céline Dion.